lundi 11 janvier 2016

Edouard KEVERS, compositeur, professeur de danse et de maintien


collection personnelle
Principalement connu pour être l'auteur de la danse L’Ostendaise, qu’il a composée vers 1860 pour les bals d’enfants du casino d’Ostende, Edouard Auguste Pierre KEVERS est né à Ostende le 7 mai 1810*, de Philippe Jacques, perruquier, et Thérèse Constance JACQUYMIS. Lors de son premier mariage, à Bruxelles en 1839 avec Anne ANDRIES, on apprend que le père d’Edouard est devenu maître de danse à Bruges. Un des frères d’Edouard, Philippe Jacques, dit aussi Philippe Bernard, est professeur de danse, comme nous l’indique son acte de mariage en 1834, à Bruges avec Sophie HALVOET.
A cette époque, le jeune Edouard est professeur de musique à Bruxelles, domicilié rue de la Putterie. En 1840 un annuaire le mentionne 28 rue de Laeken.

En 1846 “M. Kevers, professeur de maintien et chef d’orchestre, qui a dirigé cet hiver un grand nombre des principales soirées de la capitale, avait dédié à Mme la princesse de Chimay plusieurs morceaux de sa composition, exécutés à la fête donnée dernièrement à l’Hôtel de Chimay. Mme la princesse lui a fait remettre une épingle de prix, à laquelle était joint un billet de sa main, des plus flatteurs pour l’artiste auquel il est adressé”.

Collection particulière

On voit que le musicien avait le sens de la publicité, comme le confirment les nombreuses cartes de visite, appelées carte porcelaine, que l’on peut encore trouver de nos jours, et qui ont certainement été distribuées massivement dans la capitale, avec une adresse, 5 rue des Paroissiens, que je n’ai pas encore réussi à dater, mais certainement antérieure à 1851, année de son arrivée au 8 de la rue du Parchemin, où il ouvrira la salle qui sera un lieu important de diffusion de la musique et de la danse à Bruxelles dans la deuxième moitié du XIXe siècle.

En 1857, dans un entrefilet paru dans le Journal de Bruxelles, on connait mieux la valeur des cadeaux reçus par le musicien en récompense de ses services : Mme la princesse de Chimay vient d’envoyer à M. Kevers une magnifique épingle en rubis et diamant. Ce cadeau est un témoignage de satisfaction que Mme la princesse a accordé à l’habile professeur pour le talent avec lequel il a dirigé sa soirée musicale du 19 février. En 1859 c’est chez le comte de Liedekerke qu’il dirige l’orchestre de la soirée dansante. Edouard Kevers continue donc d’être au service des aristocrates belges, ce qui l’aidera certainement à devenir le directeur des bals du Casino d’Ostende.



collection personnelle




l'Ostendaise à 18'05""


C’est dans le Journal de l'Imprimerie de 1864 que j'ai trouvé la première mention de la publication de l’Ostendaise, nouvelle danse dédiée aux enfants, d’abord éditée à compte d’auteur, à son adresse 8 rue du Parchemin, elle le sera ensuite par J. B. Katto, Galerie du Roi, 10, à Bruxelles, avec une version intitulée Ostendaise figurée. Mais ce musicien n’était pas, on l’a vu plus haut, à sa première composition. Il avait déjà fait éditer à Bruxelles en 1856 : Les Cloches de Noël, redowa, et Serain-Champs, polka-mazurka, chez MEERENS, ainsi que La Cloche de Mariakerke, polka-mazurka, chez J. B. KATTO en 1863. L’Ostendaise sera dansée tout au long du XIXe siècle et deviendra même un genre très prisé dans les salons belges et français. Je possède deux partitions inspirées du même sujet : La Flamande, de F. BOISSON, éditée à Paris chez Margueritat et L’Elégante Ostendaise, de L. DEMORTREUX, éditée chez Emile Benoit à Paris, il en existe sans doute d’autres, comme celle de Savin Balonchard.


collection personnelle

 Gallica

Eugène GIRAUDET, dans son Traité de la Danse, cite d'autres danses composées par E. Kevers et éditées chez Katto ou Schott : La Colonne-Mazurka, danse Espagnole, La Bruxelloise et l'Ostendaise Valsée.

La presse se fait écho des manifestations organisées dans la salle désormais appelée salle Kevers, par exemple, en 1880, la première séance de musique de chambre donnée par le quatuor du Conservatoire, expérience renouvelée en 1882 auquel s’ajoute les artistes M. et Mme Blauwaert-Staps et M. Jokish. En 1883 s’y produit un jeune pianiste prodige de 13 ans, M. Hubert Flohr, avec au même programme M. Agniez, baryton, et M. de Pettyko, violoniste que l’on retrouve la même année dans un autre concert avec la cantatrice italienne Mme Gaetanina Friggeri.
En mai 1891 le Journal de Bruxelles annonce le décès de M. Kevers Une physionomie très connue par tout Bruxelles, et on peut dire même dans toute la Belgique : il avait initié trois générations aux mystères de la danse noble […] Il n’avait pas tardé de venir s’établir à Bruxelles et il s’était installé, dès 1851, dans la maison de la rue du Parchemin où se trouve, accotée à un jardin minuscule, cette fameuse “salle Kevers”, abri successif des conférenciers, des musiciens, des réunions dansantes, politiques ou prédicantes [sic]. Karl Lustner nous précise, dans sa liste des musiciens morts en 1891, qu’Edouard Kevers est décédé le 15 mai.


La Saison d'Ostende
23 août 1898
De son second mariage, vers 1851, avec Anne NAGELS, nait un fils, Adolphe Edouard André, en 1853. Des amis chercheurs, Marie-Christine et Patrick Bollier, m’ont signalé la présence de M. et Mme Vandermeerschen-Kevers, directeurs des bals du Kursaal d’Ostende au début du XXe siècle. C'est la fille d’Edouard, Mélanie, née d'un "troisième lit". Lors du mariage, en 1873, le couple reconnait leur fille née en 1860, la mère, Marie GAUDEUS était alors la servante du professeur de danse. En 1878 Mélanie KEVERS anime avec son père, un bal pour enfant au Kursaal d'Ostende. En 1891, avec son mari, Gustave VANDERMEERSCHEN, ils reprendront la succession de M. DURIEZ, le professeur de danse du Casino et du Kursaal.
La Revue et Gazette Musicale de Paris nous signale qu'une demoiselle Kevers, dont on ignore le prénom, jeune et jolie personne, qui a de l'intelligence et un sentiment fin et délicat a obenu un second [prix de chant] au Conservatoire de Bruxelles en 1844 et un premier prix en 1845. La recherche continue.


Christian Declerck

* et non le 18 mai 1809 comme l'a repris Flavie Roquet dans le Lexicon Vlaamse componisten geboren na 1800, publié en 2007.

Sources principales : état civil d’Ostende, Bruges et Bruxelles ; les journaux: la Saison d'Ostende, l'Echo d'Ostende et le Journal de Bruxelles